TAHITI, C'EST FINI !
Après presque un an passé à Tahiti, Jérôme et moi avons fait un bilan.
Professionnellement : Air Tahiti a mis en place un plan de redressement pour combler le déficit de l'année 2010. Les salaires et les avancements sont gelés jusqu'à nouvel ordre. La carrière de Jérôme n'évoluera plus avant une dizaine d'années dans le meilleur des cas. Son salaire est inférieur à celui qu'il gagnait à Toulouse. Mais il a validé sa licence 66 par 15 mois d'expérience professionnelle, ce qui a un certain poids sur le marché du travail.
Economiquement : la vie est vraiment très très très chère à Tahiti. Tout augmente (sauf les salaires), ce qui nous rend la vie difficile au quotidien. Même les choses simples et locales sont chères, les loisirs sont un investissement qui coûte un bras .... Et ça ne risque pas d'évoluer dans l'autre sens. J'ai besoin de soins dentaires et la CPS (CPAM locale) ne rembourse pas ce genre de frais, donc pas de remboursement non plus de la part de la mutuelle d'Air Tahiti. Impossible donc de me faire poser les couronnes salutaires (250 000 CFP = soit plus de 2 100 €) qui n'ont pourtant rien de royal. Je dois donc patienter en faisant attention à ce que je fais avec mes dents ! Il en va de même pour les appareils dentaires des enfants, les lunettes .. Pour un bon remboursement, il faut prendre une mutuelle complémentaire (comme en France) mais à un tarif que je n'ose même pas mentionner ! De plus, avec le retour d'Oscar TEMARU (indépendantiste) au pouvoir, tout ceci ne va pas s'arranger. Une partie du peuple polynésien crève de faim, vit dans des bidonvilles mais le Président s'en fout. C'est très dur à supporter au quotidien. Tahiti n'est pas un paradis pour tous.
Climatiquement : la chaleur est difficile à supporter. Les nuits sont chaudes et peu reposantes. Le climat humide exacerbe mes douleurs articulaires et me rendent la vie difficile. Je n'ose pas parler des moustiques qui transforment les journées en combat à mort ou en séance de grattage frénétique. Le répulsif est de moins en moins efficace, les "zap" (tortillons à faire brûler) font mal au crâne, les prises électriques sont hors de prix et les moustiquaires étouffantes ! Le plaisir de vivre dehors fini toujours pas être gâché par ces invasions et croyez-moi, c'est l'homme qui abandonne ! Même le simple fait de s'assoir dans l'herbe engendre l'attaque des fourmis (parfois dites "de feu" aux morsures très douloureuses) et vous devez déguerpir au plus vite ! Je ne parle même pas des cent pieds qui rodent, tapis dans l'herbe, les souches, sous les feuilles, sous les rochers ... A bas les bestioles !
Scolairement : le niveau est plus faible qu'en métropole. Ici, je devrais me transformer en institutrice à domicile pour aider Hugo à rester à un niveau satisfaisant. Je n'en ai que moyennement envie. Chacun son métier. De plus, je n'adhère pas aux méthodes éducatives de sa maîtresse (punitions à outrance, humiliations, châtiments corporels ...), qui sont, semble t-il, les méthodes NORMALES à Tahiti. La guerre est déclarée ! Nous souhaitons donc qu'Hugo puisse faire son CP en métropole.
"Distractionnellement" : on s'ennuie vite à Tahiti (c'est une île), notamment quand on n'a pas le budget pour voir autre chose. Nous avons la chance de bénéficier des billets GP mais l'hébergement dans les autres îles et atolls reste très cher, ce qui limite les possibilités "d'évasion". De plus, ces billets nous imposent de passer après les passagers qui payent leur place à plein tarif, donc nous soumettent à des contraintes pas faciles avec un enfant : poser des congés, réserver un hébergement sur notre lieu de destination, faire les bagages, se présenter à l'embarquement et .... se voir refuser le vol par manque de place !
Le tourisme vert (randonnées, balades ...) n'est pas encore très développé. Trop de sentiers passant sur des propriétés privées sont fermés au public ou nécessitent un guide car ils ne sont pas balisés. Seule la baignade dans le lagon reste la distraction favorite et facilement abordable, mais séjourner longtemps dans l'eau devient douloureux pour mes pauvres articulations et a un côté .... un peu lassant par son côté répétitif.
En ce qui nous concerne, nous avons exploré les 1000 km2 de Tahiti (enfin, ce qui est possible de voir) durant toute cette année. Nous avons eu la chance de visiter Moorea, Huahine, Fakarava, les Marquises, Bora Bora, qui sont des îles et atolls grandioses. Ils ne sont pas, hélas, notre quotidien. Notre quotidien, c'est Tahiti, c'est la surpopulation, la pollution, la saleté, le bruit, les embouteillages, l'insécurité et je dois le dire, le racisme de la part des indépendantistes ....
De plus : les problèmes d'inceste, d'alcoolisme, de violences conjugales et de violence tout court sont une réalité assez effrayante. Je ne me sens pas en sécurité ici. Il faut éviter de sortir après la tombée de la nuit et les vendredis et samedis soirs. Je ne saurais pas faire face seule, ici, à 20 000 km de ma famille, s'il arrive quelque chose à l'un d'entre nous. Et puis, autant le dire clairement : la famille nous manque ! Pierre, Clément, maman, mes frères et soeurs, les enfants de Jérôme ... Nous sommes décidément trop loin de vous !
Aussi, Jérôme, Hugo et moi avons pris la décision de rentrer en France. Nous avons envie de reprendre une vie plus sécurisante, plus confortable, qui nous permette des distractions différentes et accessibles (cinéma, restaurant, théâtre, balades, visites ...) dans des paysages variés (campagne, montagne, mer), avec un avenir professionnel plus serein, des commoditiés plus nombreuses, beaucoup moins de désagréments et une prise en charge éducative digne de ce nom pour Hugo et un accès aux soins médicaux sans nous ruiner pour tous les trois en cas de besoin.
Nous avons vécu une belle aventure qui n'est pas à la portée de tous, que peu de gens feront dans leur vie et qui restera gravée dans notre mémoire à tout jamais. Nous en sommes grandis et enrichis intellectuellement.
Malheureusement, nous laissons derrière nous des amis sincères (Charline, Jérôme et leurs enfants Loana et Joriane, Grégory ...), des voisins adorables (Marc, Virginie, Jacques, Vaihi, Toanui, la petite Vaihei ...), mais nous nous consolons en nous disant que nous allons retrouver nos amis toulousains.
Nous regretterons aussi les couchers de soleil sur le lagon derrière Moorea et le parfum des fleurs de tiare ....
Ce blog va donc se fermer comme un beau livre terminé. Mais vous pourrez le lire et le relire à volonté et vous pourrez aussi bientôt voir nos photos en vrai que nous vous commenterons !
Bonne vieille France, nous revoilà !
(après une petite halte aux Etats Unis pour vister un peu la Californie).
Nana et merci de votre fidélité, chers bloggeurs.